« La question n’était pas de faire mieux mais différemment »

Quelle est l’histoire de ce projet ?
Issue d’une famille peu commune, avec neuf frères et sœurs et une mère morte prématurément, j’avais à cœur de développer un projet sur le thème de la famille depuis la création de ma société. La série This is us a été lancée à un moment très particulier de ma vie et j’ai eu un vrai coup de cœur en la découvrant. Après une première discussion avec la Fox, je me suis positionnée dans le cadre d’un appel d’offres avec un projet d’adaptation à la fois artistique et financier qui les a séduits. Le fait d’être une petite société indépendante s’est révélé être un atout car j’étais leur unique interlocutrice. This is us est la série numéro un au box-office américain. C’est une belle victoire d’avoir été choisie.

Nous avons fait le choix de tourner uniquement en décors naturels et pas en studio, par souci d’authenticité.

Aline Panel - Productrice chez Authentic Prod

Nous avons fait le choix de tourner uniquement

en décors naturels et pas en studio, par souci d’authenticité.

Aline Panel - Productrice chez Authentic Prod

Nous avons fait le choix de tourner uniquement en décors naturels et pas en studio, par souci d’authenticité.

Aline Panel - Productrice chez Authentic Prod

Pourquoi se lancer dans ce projet alors que la série originale a eu autant de succès ?
Le défi à relever était en effet conséquent. Plusieurs amis producteurs m’ont avoué ne pas avoir participé à l’appel d’offres car ils ne voyaient pas comment faire mieux. Pour moi, la question n'était pas de faire mieux mais différemment. Toute l’adaptation a consisté à s’adresser à un public français et à le toucher dans son histoire à la fois intime et sociale avec pour toile de fond les quarante dernières années.

Qu’avez-vous changé ?
On a gardé le principe de base, à savoir cette fratrie particulière, ainsi que l’histoire et les intrigues qui en découlent et sont d’une qualité exceptionnelle. En revanche, on a changé le contexte social, politique et géographique. Les métiers des protagonistes ne sont par exemple plus les mêmes. Le personnage de Michaël, acteur de soap dans la série originale, une industrie hollywoodienne qui n’existe pas en France, devient footballeur, un sport très fédérateur et symbolique chez nous. De même, Maud et Tanguy ne se rencontrent pas dans un groupe de parole pour personnes en surpoids mais fortuitement, à la sortie d’un magasin. Du coup, la problématique du poids est au départ seulement celle de Maud, contrairement à l’histoire américaine, et cela va venir gangréner toute leur construction de couple. Mathis est adopté comme dans la version originale. Mais nous avons adapté son histoire à celle des immigrés français de la décolonisation, qui est très différente de l’histoire des Afro-Américains. Enfin, Paul, le père dans Je te promets, est ouvrier dans la construction de bateaux, un artisanat très français qui va se retrouver confronté au recul industriel et à la mondialisation au fil des épisodes.

Y a-t-il eu d’autres axes d’adaptation ?
Pendant l’écriture, le travail d’adaptation a été fondamental à l’étape des dialogues pour que nos personnages réfléchissent et parlent comme de véritables Français, pétris de notre histoire et de notre psychologie latine. Les dialogues sont plus pudiques et parfois plus secs mais sans perdre la touche propre à This is us : les fameux monologues permettant d’accéder à l’âme des personnages. Par exemple, la métaphore du bon vin que l’on produit avec du raisin amer, utilisée par le Dr Michelin, est proprement française. Comme je l’ai dit à Patrick Chesnay lorsque je lui ai proposé le rôle, il est l’âme de la série !
Contrairement aux Américains, nous avons fait le choix de tourner uniquement en décors naturels et pas en studio, par souci d’authenticité, pour justement bien «franciser» les choses.
En tournage et en post-production, nous avons beaucoup joué sur la musique. Dans chaque épisode, on entend au moins un titre de la chanson française qui a marqué toutes ces années : Alain Souchon, Laurent Voulzy, Jean-Jacques Goldman, Renaud, Francis Cabrel et bien sûr Johnny Hallyday avec le titre Je te promets.
On a aussi beaucoup travaillé sur les archives d’émissions de télévision, sur les publicités de l’époque et distillé des références politiques ou culturelles comme Coluche, les restos du cœur, la création de la fête de la musique, les matchs de football…

Pourquoi avoir choisi ce titre ?
Parce qu'il résume parfaitement notre sujet. Je te promets, c’est la promesse qu’on fait à nos bébés quand ils naissent, de leur donner le meilleur… Mais c’est aussi la promesse d’un monde meilleur. Celle qui raisonne avec l’élection de François Mitterrand et l’arrivée des socialistes au pouvoir, alors que nos personnages naissent au monde. Que sont devenues ces promesses ? C’est la deuxième question que pose la série.

L’histoire se déroule des années 70 à nos jours. Comment avez-vous retranscrit l’univers de chaque période ?
Nous avons adapté les lieux de tournage à notre spécificité géographique française dite « jacobine ». Les personnages des triplés sont élevés en province, mais choisissent des métiers dans des domaines qui les obligent à « monter » à Paris. Leur enfance se déroule sur la côte Atlantique, choisie pour ces paysages typiquement français. Filmer la période des années 70, 80 et 90 était d’ailleurs plus facile dans la région de La Rochelle car il y a moins de traces du présent. La maison d’enfance des triplés date des années 70. Elle était totalement dans son jus. Nous avons dû l’aménager pour les besoins du film mais la base était parfaite. Pour illustrer les différentes époques, de la rencontre des parents à l’adolescence des triplés, on a fait évoluer la décoration en jouant sur les accessoires, les meubles et un gros travail d’habillage, maquillage et coiffure, notamment de perruques, a été réalisé sur les comédiens.

On a attendu d’avoir les rôles principaux pour ensuite chercher leur réplique dans le futur ou le passé. Pour les triplés, nous avons d’abord choisi les comédiens adultes pour sélectionner ceux les interprétant plus jeune 

Comment s’est partagé le travail entre les deux réalisateurs ?
Arnaud Sélignac s’est occupé des six premiers épisodes et Renaud Bertrand a mis en scène les six suivants. Pendant que l’un tournait les épisodes avec l’intrigue au présent à Paris, l’autre tournait le passé à La Rochelle. Camille Lou et Hugo Becker ont donc par exemple commencé le tournage par les scènes de l’épisode 7 avec Renaud Bertrand et ont attendu qu’Arnaud Sélignac arrive à la Rochelle après son tournage parisien pour tourner les premiers épisodes. Cette organisation nous a permis de tourner en quatre mois au lieu de six et de disposer ainsi de ces acteurs très demandés.

Qu’est-ce qui devrait captiver les téléspectateurs ?
La famille, tout le monde en a une et c’est une valeur qui aujourd’hui reste très forte, notamment en ces temps d’épidémie et d’isolement. La série met en scène des personnages extrêmement sincères et attachants, sans être naïfs. Notamment celui de Paul, qui décide de garder en lui sa part sombre pour offrir uniquement du positif aux gens qu’il aime et enchanter leur quotidien. Ces protagonistes courageux et bienveillants tiennent leurs promesses et malgré les difficultés de la vie, c’est le plus souvent l’amour qui triomphe ! Je te promets parlera aux enfants, sensibles aux souffrances qu’ils vivent ou perçoivent sans oser les raconter, mais raisonnera aussi chez les adultes car nous sommes tous confrontés à des problèmes intimes ou de place dans la société qui trouvent leurs racines dans l’enfance. Ils se reconnaîtront et vivront avec ces protagonistes tous ces moments et étapes clés de la vie qu’ils soient tristes ou heureux. Dans le monde dans lequel nous vivons, cette série émouvante inspire et fait du bien ! Je te promets peut vraiment réunir toutes les générations.